vendredi, janvier 27, 2006

PHILIP-KINDRED-DICK

Un Long.
Voyage.

Un long voyage qui prend fin. Jamais facile de poser le pied sur la terre ferme quand on descend de l'avion en ignorant où on s'est posé, puisque l'objectif du voyage n'était pas la destination, mais le voyage en lui même.



Difficile à croire, peut-être, qu'on puisse prendre un avion avec comme destination sur le billet le mot 'OPEN', en se disant que le plus important, dans tout ça, c'est les instants qu'on passera dans l'avion et pas la destination. Car le voyage fait la destination, si le pilote n'existe pas, si l'avion c'est soi, et si on se pose quand il n'y a plus de carburant (et Personne n'atterrit d'ailleurs au même endroit dans ce genre de cas).

Monter à bord d'un livre, se faire emmener loin, très loin. Et quand je termine le livre, où ai-je atterri ? A quelle distance de moi-même me suis-je propulsé, sans possibilité (ni volonté d'ailleurs) de retour en arrière ? Le fin du fin en science-fiction: des voyages, one-way ticket, faits pour exploser ses propres limites et s'affranchir de manière permanente des barrières et des frontières d'un mode de réflexion et d'une appréhension du monde bétonnées dans des règles imposées et régies par des systèmes civilisateurs qui droguent l'humain voire le lobotomisent, le zombifient pour l'empêcher de voir les murs du labyrinthe que certains ont construits et continuent de construire, sans aucun plan précis. Un labyrinthe où les gens errent, idiots accaparés par le culte du 'moi-je' auto-défensif, inconscient de l'absence de leur capacité d'ouverture, pour mieux infliger aux autres une parodie de leur propre image dans tout ce qu'elle a de décidée, de mature, de confiante et de supérieure. Des systèmes qui se percutent de plus en plus violemment dans un environnement léthargique globalistique où domine un monde de pensée fondamentalement encré dans la non remise en question des règles civilisatrices, mettant dès lors au grand jour la présence quasi-planétaire de la non-réflexion sur les fondamentaux d'une société équilibrée qui réponde aux aspirations les plus simples de toutes les espèces, y incluant nous mêmes, cafards humains.

Je viens de terminer le 35ème et dernier (pour moi) roman de science fiction de Philip K. Dick. Un long voyage, entamé par hasard par le visionnage de Blade Runner en 1984. Je me sens seul, même s'il me reste encore deux ou trois romans traditionnels non-sf de l'auteur à lire, et les morceaux disponibles en langue anglaise de son Exégèse. Ce parcours se termine volontairement par Robot Blues, 'Do Androids Dream of Electric Sheep', histoire de refermer proprement le cercle à l'endroit même où je l'avais commencé. (Blade Runner est l'adaptation de ce roman).


Que m'a apporté ce voyage ?
Une violente déstructuration de mon mode de pensée: j'étais un terreau propice, je suis un logiciel bipède auto-adaptatif de remise en question. Je m'exténue à discerner les molécules qui forment le distributeur de boisson pour discerner, au travers, le mur sur lequel il est adossé, pour voir les molécules du mur, pour voir au travers les molécules de la rue derrière le mur. Et ainsi de suite, comme dirait Vonnegut. Je suis devenu un anti-saint-thomas, son négatif, Ctrl+I sous Photoshop, je veux être certain de voir pour être sûr de voir ce qui justement n'est pas, ce qui prétend être, ce qu'on veut tellement que ce qui n'est pas fusse. Dans la parodie de civilisation qui nous fournit le couvert, le lit, la télé et les panzanis, ce qui est n'est pas. Il ne faut pas seulement le savoir, il faut le voir. Il faut le voir pour y croire. Un puit sans fond.
Je ne prends aucune décision le jour même, je cherche toujours un troisième angle de vue dans les sujet de discussion; et surtout, je remets en cause systématiquement mes opinions lorsque celles-ci me semblent absolument convaincantes pour moi: si elles le sont, c'est qu'elles ne sont pas de moi, mais me sont imposées par un schéma de réflexion superficiel émanant soit des couches récentes de propagande qui sont venues se déposer sur mes circuits, soit du tiroir à 'short-cuts', tellement facile et soulageant parfois encore.

Voiker ?
Où tu veux en venir, en fin de compte ?
- Je suis juste en train de me frapper la tête sur le Tarmac.


3 commentaires:

Hunter A Parano a dit…

« La musique m’est fondamentale, consubstantielle, elle participe tellement de mon être, et je crois même que c’est en elle que s’organisent mes passions. Quand j’assiste à un concert, je suis comme le voyageur embarqué pour une destination inconnue, mais qui ne peut pas ne pas partir. Je consulte les dépliants, les cartes du continent inexploré, où le rêve enfin va devenir réalité ».

Tant que l'envie de voyager existe, tout es possible !

unoblog a dit…

As tu lu "Je suis vivant vous êtes tous mort" qui est une bio écrite par Emmanuel Carrere. Il avait fait une étude assez poussée sur le contexte de l'ecriture de chacun de ces romans...

Philrodv2
rodroom.blogspot.com

D'Arcy a dit…

Réponse à Rod:
non, je l'ai pas (encore) lu. J'ai hésité plusieurs fois à me payer le bouquin sur Ebay quand il passait, mais j'ai pas encore percuté. J'ai lu d'autres analyses (bouquins de Sutin, interviews de PK Dick sur différents sites web). J'ai une bonne visibilité de l'intéraction vie privée /délires de l'auteur /thème des livres.

Meric en tout cas d'être passé me voir, Rod.

Keep in touch,

Kuronext
http://www.wiwilbaryu.blogspot.com