mercredi, mai 02, 2007

EXTRACTIONS-CINQUANTE-SIX

----- Julien Gracq / Un Beau Ténébreux
----- Librairie José Corti, 1945

« Là pourtant serait peut-être le seul crime sans rachat : dans une vie gâchée, rognée, rongée par la paresse, la peur, le scrupule calculateur. L’anéantissement minutieux et quotidien des possibilités offertes. Et, pour en finir, cet étouffement, justifié par un moelleux système de scepticisme. Ce qui commence par « Je me hâtais de déplaire exprès, par crainte de déplaire naturellement » (Mauriac) continue par « Je me hâtais d’échouer exprès, par crainte d’échouer naturellement », et pourrait se terminer un jour par : « Je me hâtai de mourir exprès, par crainte de mourir naturellement » (une phrase d’excellent comique). Rien de plus propre peut-être à épuiser une vie qu’une telle combinaison de l’orgueil et de la lâcheté (« Cela finira mal »). »

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Les autres extractions du livre, ici.

7 commentaires:

Anonyme a dit…

excellente phrase
je me hâte de mourir exprès ...
quant au "je me hâte de déplaire pour ..." j'ai eu souvent l'impression de fonctionner comme ça, avant bien sûr, avoir des ennemis , oh juste quelques uns, cela me plaisait bien...mais j'espère que j'ai changé, je n'en suis pas très sûre.et toi? tu as déjà expérimenté cela, le "je me hâte de ..."?
je me hâte de te faire des bises avant qu'il ne soit trop tard. (bin oui maintenant je te fais des bises virtuelle!)

Anonyme a dit…

C'est ce qu'on appelle "couper court."

D'Arcy a dit…

IF6> C'est à Gracq qu'il faut faire la bise...

Anonyme> Quel est ce 'on' ?

Anonyme a dit…

Ce n'est pas ce qu'"on" appelle impersonnellement "couper court", ces comportements Hâtifs?
Moi non, je ne coupe pas court mais je constate que souvent "ça tourne court"

D'Arcy a dit…

Je ne sais sil l'on peut parler de comportement hâtif.

Prendre une décision, un jour, cela tient-il du comportement hâtif face à la non-prise de décision ?

Anonyme a dit…

Les comportements hâtifs évitent bien souvent d 'atteindre et de se confronter à l'instant décisif.

D'Arcy a dit…

Il est difficile de philosopher sur le caractère hâtif d’un comportement, sans prendre une action précise à titre d’exemple. Et je pense que selon l’action, multiples peuvent être les analyses. Ta phrase me semble très absolue, mais peut-être se rattache t-elle à un événement ou une expérience précise que tu as vécu.

Ce qui fait le charme de la phrase de Gracq, c’est en quelque sorte le propre jugement, la propre évaluation du caractère ‘hâtif’ de l’action par la personne qui la réalise. Il me semble en général que le jugement, hâtif ou tardif, vient le plus souvent d’une tierce personne, d’un observateur, qui jugera par la même de l’action d’une autre personne, cette tierce personne croyant avoir en main une vision globale du déroulement d’un événement, ou jugeant à posteriori des faits d’une autre personne, tâche si facile…

Je pense qu’une personne réalisant une action pense toujours prendre la bonne décision au bon moment, avec plus ou moins de sensibilité qu’en au risque qu’elle prend. Il n’y a pas de caractère hâtif. La nuance introduite par Gracq est cette ‘volonté de faire les choses dans la hâte’. Sans cette volonté qui est moteur de la hâte, aucune décision je pense ne peut-être considérée comme hâtive au moment où elle est prise dans l’esprit de celui qui commet l’action.